Il y avait peu d’air dans la salle ce samedi, saturation d’humidité et d’émotion certainement, parce qu’un cheval blanc d’une stature de cathédrale qui semble relié au public comme aux étoiles, ça en impose. Lui c’est Corazon, le sabot immobile dans le sable couleur de sang séché, le visage lourd, l’oeil perle noire attentive, les oreilles qui tournent comme des éoliennes en attendant sa maîtresse.

Car elle est sa maîtresse, sens propre, sens figuré, dans tous les sens. Laetitia Dosch est nue pour mieux symboliser sa part animale et rejoindre l’injoignable animalité du cheval. Sa robe à lui est blanche, sa robe à elle est par terre. Armée d’un sabre qu’elle tend parfois vers le ciel, dans un décor pictural vibrant, elle cherche à s’approcher de lui, hantée, désirante. Dans un monologue brut blessé de poésie, l’actrice parle avec le cheval ou fait parler le cheval. Ensemble ils font tout, tout sauf un enfant puisque la barrière finit par se dresser, herse qui hennit dans le fond du bois.

La bataille pour la conquête fut belle, en témoigne le sable collé sur le corps de Laetitia, comme une empreinte d’une rencontre finalement réelle.

Sur le site du théâtre de Vidy