En évoquant les métamorphoses, il est impossible de faire l’impasse sur le transformiste Leopoldo Fregoli (1867 – 1936) artiste italien, ventriloque et musicien, qui a régalé en son temps un public enthousiaste grâce à sa faculté de changer de costumes très rapidement. Outre le fait d’être avec Auguste Lumière un des pionniers du cinéma, Fregoli a réussi à interpréter cent rôles costumés dans une seule pièce. Seul-en-scène, il a monté un spectacle intitulé «le théâtre à l’envers» durant lequel il change des dizaines de fois de tenues, et ceci grâce aux nombreux costumiers planqués dans les coulisses, parfois au nombre de vingt… Sa vocation se concrétise pour la première fois alors qu’apprenti en horlogerie, il se fait passer pour une cliente, puis plus tard envoyé en Afrique lors du conflit entre l’Italie et l’Ethiopie, alors que trois soldats sensés jouer dans sa pièce sont absents, il relève le défi de jouer tous les rôles… Marquant les esprits, l’artiste a inspiré le phénoménal Arturo Brachetti et donné son nom à une pathologie appelée «le syndrome de Fregoli», délire paranoïaque qui pousse le patient à se sentir persécuté par une personne laquelle se déguiserait afin de pouvoir mieux le martyriser.

Non moins déjanté, Eddie Murphy joue dans «La Famille Foldingue» une brochette de huit personnages. Dans cette histoire de trafique d’ADN, l’acteur américain se glisse avec délectation dans les rôles féminins ou masculins, jeunes ou grisonnants. Mais la palme d’originalité est attribuée au chef d’œuvre psychanalytique de Woody Allen «Zelig» dont le héros développe un esprit de caméléon par peur du rejet. Réalisé au début des années quatre-vingt, soit avant la numérisation, Woody Allen parvient à inclure son personnage, qui n’est autre que lui-même, dans des séquences historiques, sans qu’on puisse déceler d’imperfections techniques. La fascination pour la transformation est sans limite, à croire que l’humain si développé serait jaloux de la plus petite des chenilles…