C’est la boule au ventre qu’on lit «l’Immortelle», magnifique bande dessinée d’Hervé Duphot et Pascal Bresson, qui relate entre autres les 3 jours décisifs concernant «la bataille de l’IVG» en novembre 74.

L’histoire débute lorsque Jacques Chirac propose à Simone Veil d’entrer dans son gouvernement au ministère de la santé. Giscard d’Estaing désire féminiser son équipe. Simone Veil est alors lâchée dans une arène – 9 femmes députées pour 482 hommes- avec son projet-phare : la lutte pour le droit à l’avortement, «une affaire de bonnes femmes» dixit Jacques Chirac. Chignon et chemisier, la clope qui rappelle une petite locomotive qui ne s’éteint jamais, la magistrate empoigne ce qui deviendra la «loi Veil» contre ses détracteurs et les organisations catholiques qui veulent sa démission.

La bande dessinée mélange quatre couleurs, la partie bleue concerne son poste de ministre de la santé, la partie jaune revient par touches sur l’enfance d’abord heureuse de Simone Annie Jacob avant de virer au gris-noir pour évoquer sa mise à la porte de son école -c’est un professeur qui l’aidera à terminer ses études hors système- et la déportation de toute sa famille dans les camps où trois membres périront, sa mère dans ses bras à Bergen-Belsen, juste avant la libération, son père et son frère en Lituanie.

Ancienne scout devenue avocate, Simone Veil aurait pu s’appeler Marmotte Immortelle. La plus jeune des camps survivra à la barbarie organisée et aux «baraques du diable» où elle se liera d’une amitié indéfectible avec Marceline Loridan-Ivens. Survivante, elle gardera une force irréversible pour tous les combats qu’elle mènera, la bataille pour l’IVG en tête. Son but est d’en finir avec les tricoteuses et les faiseuses d’anges, -300’000 interventions illégales par an- et faire taire les intégristes. Ses détracteurs parlent d’euthanasie légale et ce débat controversé mettra en scène plusieurs personnes dont Marie-Claire Chevalier, partie verte, arrêtée pour avoir avorté illégalement suite à un viol et qui échappera à la prison grâce à la défense de Maître Gisèle Halimi.

Marie-Claire Chevalier défendue par Gisèle Halimi

Marie-Claire Chevalier défendue par Gisèle Halimi

Suspense, horreur et solidarité, «L’Immortelle» se lit d’un trait et si les nazis tatouaient des chiffres sur les bras de leurs détenus, ce sont ceux de la victoire qui restent en tête après cette aventure: adoption avec 284 voix contre 189 à l’Assemblée nationale.

 

Couverture de la BD L'immortelle

 

Les coulisses de l’album